Des magasins bio… Et beaux ?

Des magasins bio… Et beaux ?

Mettre la première fois les pieds dans un magasin bio relève du saut dans l'inconnu pour beaucoup de consommateurs. On n'a plus ses repères, on ne connaît ni les marques, ni les produits… De quoi être perdu. Surtout s'il n'y a pas un effort de la part du magasin pour mettre en place de la lisibilité. Or en terme d'agencement et de décoration, beaucoup de magasins bio de l'ancienne génération sont relativement sommaires. À l'heure où le bio quitte son positionnement de niche, c'est devenu un vrai problème…

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Sommaire

- Du magasin diététique à la supérette
- L'esprit supermarché
- Des difficultés, des faillites
- Les magasins de nouvelle génération
- Agencement, décoration : raconter une histoire cohérente

"Shoyu, gomasio, seitan, tempeh… C'est quoi ces trucs ?". Sandrine vient acheter pour la première fois son jus de pomme dans cette supérette bio et elle est perdue. Elle erre dans les rayons et contemple les produits comme en pays étranger. "Et puis comment se fait-il qu'on nous fasse payer beaucoup plus cher qu'ailleurs alors qu'on nous présente les produits comme dans un discount ?"
Il y a des raisons historiques à cela. Flash-back.

Du magasin diététique à la supérette
Il y a d'abord eu l'époque du magasin diététique : on avait l'impression de rentrer dans une pharmacie, ce qui semblait classer définitivement le client du bio dans le camp des malades chroniques ! Mais si on passait outre, on y trouvait de bons produits et on obtenait facilement un conseil de bonne tenue.

Il y a eu aussi les premières chaînes de magasins qui donnaient le sentiment de se retrouver sur le plateau du Larzac ou dans une (gentille) secte. On pouvait s'y sentir mal à l'aise, pourtant généralement les bons produits et le conseil étaient là aussi.
Quant à la décoration, le raisonnement était : "si c'est trop bien présenté ça fait trop riche". On a alors confondu simplicité et austérité.

L'esprit supermarché
Au milieu des années 90, il y a eu un tournant, au moment où le bio a commencé à sortir de son marché de niche. Avec les premiers magasins de 300 m2, l'esprit du magasin bio est devenu de plus en plus celui du supermarché.
"Pendant 15 ans, tous les gens qui ne savaient pas quoi faire pour gagner de l'argent se sont mis à monter des magasins bio. On était sûr de bien gagner sa vie même si le magasin était nul, même s'il était mal placé", se souvient Régis Destrac, ancien créateur de magasins bio.
"Il y avait un esprit différent, genre grande distribution : on se moquait de l'accueil, du conseil et du décor. De toute façon, la clientèle était captive, prête à se déplacer pour trouver ses produits bio."

On a cette fois-ci confondu simplicité et rentabilité. En allant parfois jusqu'au négligé : propreté douteuse dans certains points de vente.

Des difficultés, des faillites
"Maintenant c'est en train de changer et certains magasins font faillite."
Il faut dire que la grande distribution fait une offensive sans précédent dans le domaine du bio et offre à ses clients une gamme de produits presque aussi large que celle des magasins spécialisés.

Le noyau des historiques est dans une déstabilisation violente. S'ils ne prennent pas la mesure de ce qui est en train de se passer et s'ils n'évoluent pas, ils risquent gros.

Les magasins de nouvelle génération
Régis Destrac est formel :"maintenant, il va falloir être bien placé, avoir une ambiance agréable, décor, service, conseil, pour se distinguer de l'esprit supermarché. Mais les magasins bio auront toujours un temps d'avance sur la grande distribution." La différence se fera sur les produits d'épicerie fine, le conseil, la présence d'un rayon de produits frais.

Agencement, décoration : raconter une histoire cohérente
Pour Christophe de Saint-Pierre, directeur commercial de Moulin des Moines, le bio continue de se construire. "Les magasins de proximité un peu plus recherchés avec un peu plus de marketing s'en sortent mieux. Beaucoup étaient rentrés dans la facilité du libre-service et avaient oublié d'aller à la rencontre du consommateur."
Or, le magasin doit "raconter une histoire cohérente : qualité/prix/présentation. La question du prix cher ou pas cher peut être dépassée si on sait comment expliquer les choses et valoriser les produits."

Sandrine a raison de trouver incompréhensible le fait de payer des produits plus chers alors qu'ils sont présentés comme chez ED ou Leader Price. Ces prix sont peut-être justifiés, mais comme ils ne sont pas expliqués, elle fait un rejet.
Ce qu'elle attend c'est d'être guidée, mise à l'aise, de circuler de manière agréable en ayant facilement la possibilité d'ouvrir un dialogue avec des professionnels qui vont pouvoir l'orienter. Alors elle aura le sentiment d'en avoir pour son argent.

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L'exemple de BioC'Bon

Cette nouvelle chaîne se développe en Région Parisienne (Paris, Vincennes, Montrouge) et le 8e magasin ouvre en novembre à Levallois. Pour BioC'Bon, l'idée en matière de décoration et d'agencement c'est "apporter en peu de modernité dans un monde souvent archaïque, et essayer de créer un moment agréable pour le consommateur."
Laurène Beurdeley, directrice de la communication de BioC'Bon, explique les principes : travail sur la lumière, sur les couleurs avec notamment le vert du logo, mise en évidence des produits, enchaînements logiques. Tout est pensé pour "la facilité à trouver".

"Un système de stands montre qu'il s'agit d'un commerce de proximité : boucherie, crémerie et fruits et légumes. Le conseil est un élément très important. Il y a dans certains magasins une naturopathe qui est là pour les conseils nutrition et beauté. Et nous allons essayer d'étendre l'expérience à d'autres magasins."

Y'aurait-il des génies du merchandising qui se seraient penchés sur la question ? Pas du tout, cette réflexion est simplement le fruit d'un travail d'équipe.

À BioC'Bon on n'est pas inquiet par rapport à la grande distribution. "Leurs produits en marque de distributeurs n'ont pas vraiment de logique éthique et ne sont pas sur le même créneau que nos produits de niches très spécialisés".

Vie Saine et Zen