Ces enfants qui disent entendre des voix, voir des personnes décédées ou vivre divers expériences inexpliquées, comment les accompagner ? Les adultes de l’entourage doivent faire preuve d’empathie, d’ouverture et de compréhension…

Sommaire
- Les hypothèses : matérialiste et postmatérialiste
- L’attitude des adultes
- Empathie, ouverture et compréhension
- Créer un rituel apaisant
- Consulter un thérapeute spécialisé
- Fixer des limites
- S’ouvrir à l’inconnu
Il arrive fréquemment que des enfants, notamment de 2 à 7 ans, vivent et racontent des expériences inexpliquées de plusieurs sortes. Il y a les récits évoquant une éventuelle réincarnation ou une expérience de fin de vie (voir : Comprendre les expériences de mort imminente). Il y a aussi ces enfants qui entendent des voix ou disent voir des personnes décédées. C’est ce qu’on appelle des “vécus subjectifs de contact avec un défunt” (VSCD). Il y a les échanges télépathiques avec les animaux ou la nature en général.
Que penser de ces phénomènes ? Christine Fawer, vice-présidente d’une association suisse pour l’exploration de la conscience (APEC), s’est entourée de médecins, biologistes, sages-femmes, infirmières, anthropologues, psychologues, spécialistes des expériences liées à la mort, pour tenter une approche scientifique de la question.* Selon ces experts, face à ces récits, deux hypothèses ou deux écoles de pensées se présentent à nous.
Les hypothèses : matérialiste et postmatérialiste
La doctrine matérialiste, prédominante dans les sociétés occidentales, affirme que la matière est la seule réalité et que tous les phénomènes en découlent. C'est le primat de la matière sur l’esprit. Dans cette doctrine, le cerveau génère et régit la conscience et celle-ci s’éteint à la mort du corps. Toute expérience inexpliquée est donc forcément un phénomène électrique ou chimique créé par le cerveau.
Une autre école se réfère à l'hypothèse spirituelle ou postmatérialiste. Dans ce concept, la conscience est première, plus fondamentale que la matière. Elle précède et survit au corps physique est n'est opérée par le cerveau que pendant la durée de la vie incarnée. Elle pourrait être de nature quantique, ressemblant au comportement inattendu de ces particules microscopiques observées par les physiciens.
"Les scientifiques qui se rallient à ce paradigme proposent une vision holistique de la réalité, intégrant la conscience comme un aspect central et potentiellement créateur de la réalité", précise Christine Fawer. "Cette perspective examine la possibilité que la conscience soit non locale, transcendant les limites du cerveau et même de l’espace-temps…"*
L’attitude des adultes
Dans tous les cas, les adultes peuvent se retrouver déconcertés face à ces phénomènes. Qui ne le serait pas ? La peur et le déni peuvent facilement prendre le dessus. La tentation est grande d’expliquer qu’il s’agit de perceptions erronées, d’illusions, d’hallucinations… Et dans certains cas, de poser la question de la santé mentale de l’enfant, de pathologiser son vécu.
Ces réactions peuvent lui causer des souffrances et avoir sur le long terme des répercussions dommageables sur sa psychologie : lui donner l’impression qu’il est différent des autres, l’inciter à cacher ses perceptions. Cela peut atteindre son estime de lui-même et peut même le conduire à des idées suicidaires.
En revanche lorsque la famille accueille les phénomènes sans jugement, lorsqu’elle reste à l'écoute, les expériences sont en général bien vécues.
Empathie, ouverture et compréhension
“Accompagner ces enfants demande donc une approche empreinte d'empathie, d'ouverture et de compréhension”*, recommande Christine Fawer.
Le premier conseil est d’encourager l'enfant à partager ses expériences sans peur de jugement, lui montrer qu'on les prend au sérieux en écoutant attentivement ce qu'il a à dire. Il est important de valider ses émotions et de lui dire qu'il est normal qu’il se sente confus, effrayé ou peut-être excité par ce qu'il vit.
Il convient ensuite de l’informer sur les croyances culturelles et religieuses concernant la mort et l’au-delà. On peut lui expliquer nos propres convictions et préciser que tout le monde ne voit pas les choses de la même manière (voir encadré).
Créer un rituel apaisant
Il faut aussi s’assurer que l’enfant se sente en sécurité dans son environnement quotidien. Ne pas hésiter à créer un rituel apaisant avant le coucher ou en cas d’angoisse : allumer une bougie ou écouter de la musique relaxante. L’adulte doit apporter du réconfort.
On peut encourager l’enfant à exprimer ses expériences à travers des formes d'art tels que le dessin, la peinture ou l’écriture.
Consulter un thérapeute spécialisé
Il ne faut pas hésiter à consulter un thérapeute spécialisé dans les enfants et les phénomènes "paranormaux". Ce dernier peut aider l'enfant à développer des stratégies pour gérer ses expériences de manière constructive.
Il existe des groupes de soutien où le jeune peut partager avec d’autres personnes ayant des expériences similaires.
Il est important de vérifier que tous les membres de la famille comprennent bien ses besoins.
Fixer des limites
En cas de VSCD, Christine Fawer conseille de discuter avec l'enfant des limites éthiques de ses interactions avec les défunts, en soulignant l'importance du respect et de l'intégrité. L'aider à comprendre qu'il est important de fixer des limites pour se protéger émotionnellement.
S’ouvrir à l’inconnu
Les enfants vivent une période de grande perméabilité et d'ouverture à l'inconnu. Dotés d'une imagination débordante et d’une grande curiosité, ils explorent le monde avec un regard neuf. Leur cerveau est moins contraint par les schémas de la pensée adulte, ce qui pourrait faciliter leur accès à d’éventuelles dimensions invisibles.
“Le monde est un lieu vaste et complexe, rempli d'énigmes et de réalités qui dépassent souvent notre compréhension immédiate. Rejeter d'emblée ce qui ne correspond pas à nos schémas de pensée, c'est se fermer à la possibilité d'apprendre et de progresser”*, affirme Christine Fawer.
*Ces enfants qui disent voir ou entendre des défunts, Christine Fawer, éditions Exergue
En savoir +
Le respect des croyances
Lorsqu’un enfant vit un deuil, cela suscite chez lui toute une variété de croyances religieuses ou spirituelles.
"Plutôt que d'imposer une croyance spécifique, les adultes devrait veiller à ce que la croyance adoptée par le jeune lui procure du réconfort"*, conseillent Josée Masson et Justine Mc Hugh, travailleuses sociales auprès des enfants et des adolescents.
Elles considèrent qu’il est important d’être dans une démarche de vérité et donc d'expliquer l'existence de plusieurs croyances en donnant des exemples concrets : "Moi, j'aime penser que grand-maman est un ange, car j'aime les anges et je les vois comme étant protecteurs. Ça m'aide quand je m'ennuie trop d'elle. Mais c'est ce que moi je crois. Tu peux croire autre chose et c'est parfait ainsi."*