Alzheimer : prévenir les troubles de la mémoire

Alzheimer : prévenir les troubles de la mémoire

Devant l'ampleur de l'épidémie d'Alzheimer, la science est encore désarmée mais progresse petit à petit. Et si c'était nos habitudes, nos modes de vie qu'il fallait remettre en cause ?

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Sommaire

- La réserve cérébrale
- Avantage pour les bac+12 !
- Les facteurs génétiques
- Soigner ou vacciner ?
- Diabète de type 3
- L'approche de la MTC

Les troubles de la mémoire sont courants, souvent bénins et n'indiquent pas forcément la présence d'une pathologie grave. Ils peuvent être dus à un simple manque de sommeil, au stress ou aux effets secondaires de certains médicaments. Mais les maladies cérébrales concernent un nombre de gens de plus en plus élevé. Elles deviennent un problème majeur de santé publique, notamment du fait de la croissance des maladies neurodégénératives dont la plus emblématique d'entre elles : Alzheimer. Le nombre de personnes atteintes est aujourd'hui de 900 000 en France, de 28 à 33 millions dans le monde. Le coût pour la société représenterait 1 % du PIB mondial*.

La réserve cérébrale
Pourtant les connaissances scientifiques sur le fonctionnement du cerveau ont fait de gros progrès ces dernières années. On vient notamment d'en comprendre un élément déterminant : la réserve cérébrale (ou réserve cognitive).
"Cette notion vient d'une étude qui a mis en lumière, chez certains sujets, un décalage entre des symptômes sévères de lésions cérébrales et des conséquences cognitives relativement modestes", explique Francis Eustache**, universitaire, spécialiste de la mémoire humaine et président du conseil scientifique de l'Observatoire B2V des mémoires.
Pour faire simple : malgré les lésions dues à la maladie, le cerveau est capable d'organiser de nouvelles connexions qui évitent à la personne de manifester les symptômes. La réserve cérébrale serait cette capacité fonctionnelle du cerveau à jouer "un rôle de tampon entre une pathologie cérébrale et l'expression clinique de cette affection".

Avantage pour les bac+12 !
Cette réserve est très variable selon les individus. Certains cerveaux sont plus capables que d'autres de bénéficier de cette neuroplasticité, selon des paramètres qui agissent en combinaison les uns avec les autres tout au long de la vie.

Le premier facteur est le niveau d'éducation. "On a moins de risques d'Alzheimer avec un haut niveau d'études", affirme Hélène Amieva**, psychogérontologue. Mais il faut aussi considérer que l'éducation se poursuit toute la vie à travers les activités sociales et de loisirs.
"Beaucoup de recherches montrent que le fait de pratiquer des activités pendant longtemps, avec d'autres personnes, a un impact sur la manière avec laquelle notre cognition va vieillir."

Les autres paramètres qui permettent de mieux utiliser nos ressources s'organisent selon un schéma que Catherine Thomas-Antérion**, neurologue, appelle un "trépied" : hygiène de vie, bien-être, lien social (voir encadré).

Les facteurs génétiques
Selon elle, la génétique joue un rôle modeste. "Il y a des gènes qui prédisposent et des gènes qui protègent. Avec l'épigénétique, d'ici 5 à 10 ans on saura que le fait, par exemple, de manger des fruits rouges a un effet intéressant pour certains sujets mais pas pour d'autres. On pourra faire de la prévention ciblée comme on fait des traitements ciblés dans certaines maladies comme le cancer. Mais cela se fera avec un encadrement majeur vu les questions éthiques que cela soulève."

Soigner ou vacciner ?
Le moins qu'on puisse dire c'est que les médicaments censés prévenir ou traiter la maladie d'Alzheimer ne sont pas au point. Ceux qui existent actuellement ne font qu’atténuer les symptômes et seulement pour 20 à 30 % des patients*.

Quant aux vaccins, "les essais à ce jour ont tous été négatifs", regrette Catherine Thomas-Antérion. Des études sont en cours. On en saura plus d'ici deux ou trois ans.

Diabète de type 3
Certains scientifiques ouvrent de nouvelles pistes. À l'instar de Michèle Serrand***, ils ont remarqué qu'il y avait une association entre la maladie d’Alzheimer et la difficulté d’utilisation du glucose au niveau cérébral. La maladie d'Alzheimer serait donc une sorte de diabète qu'on pourrait qualifier "de type 3". Ainsi on serait fondé à regarder du côté de la flore bactérienne intestinale et des conséquences d'une inflammation chronique due à une hyperperméabilité de la paroi de l'intestin (voir : L'intestin : un rôle stratégique dans notre santé). Conclusion : un régime alimentaire adapté pourrait non seulement prévenir mais aussi ralentir la maladie chez certains patients.

Mary Newport**** est médecin aux États-Unis et a accompagné son mari atteint d'Alzheimer. Elle a découvert que l'acide laurique, contenu notamment dans l'huile de coco, pouvait faire régresser sa maladie. Elle retrace son expérience dans un livre où elle invite le monde scientifique à se pencher sérieusement sur ce produit.

L'approche de la MTC
La médecine traditionnelle chinoise (MTC) propose une approche globale des troubles de la mémoire, comprenant notamment une remise en cause de notre hygiène de vie. "Il y a une connexion très importante en MTC entre le cerveau et les reins. Le cerveau dépend de deux fonctions : le yin des reins (la matière, ce qui le rend spongieux, humide) et le yang des reins (l'énergie pour faire monter la sève jusqu'au cerveau)", explique Liliane Papin*****, spécialiste de MTC, qui va donc s'attacher à "régénérer le yin des reins", notamment en évitant la déshydratation.
"Alzheimer est une amnésie collective. Nous avons oublié des choses primordiales : comment prendre soin de soi et de la planète. Nous avons oublié notre relation à la terre à travers notre alimentation et notre relation à l'apprentissage humain. Le défi d'Alzheimer nécessite qu'on accepte de changer nos habitudes."

 

Sources :
*Le Monde : Diagnostic, évolution, traitement : ce que l’on sait de la maladie d’Alzheimer
**Co-auteur notamment de Les troubles de la mémoire : prévenir, accompagner, éditions du Pommier
***Auteur notamment de Maladie d'Alzheimer : et s'il y avait un traitement ?, éditions Thierry Souccar
****Auteur de Maladie d'Alzheimer - et s'il existait un traitement ?, éditions Josette Lyon
*****Co-auteur notamment de Les trésors de la médecine chinoise pour le monde d'aujourd'hui : Nourrir et allonger la vie, éditions Trédaniel

Sources complémentaires :
Ameli Santé : Maladie d'Alzheimer
France Alzheimer et maladies apparentées

 En savoir +

Un "trépied" pour nos ressources cérébrales

- L'hygiène de vie : bien manger, bien bouger.
Le régime méditerranéen est le régime de référence. "Les aliments qui sont toujours cités sont les aliments antioxydants notamment les fruits rouges et le soja. Mais il faut savoir que 20 % de la population caucasienne est allergique au soja", précise Catherine Thomas-Antérion.
Parmi les activités physiques conseillées, beaucoup d'études concernent les pratiques méditatives, le Taiji Quan, le Qi Gong.
"De fait, la pratique du Taiji chez le sujet sain améliore l'attention dans certaines maladies neurodégénératives, Alzheimer et surtout Parkinson. Elle va effectivement entraîner des modifications cérébrales et de meilleures stratégies en terme attentionnel."

- Le bien-être. "Créativité, motivation, curiosité, élan vital… Toutes les activités sont positives, y compris le travail, si elles sont effectuées dans le bien-être".

- Le lien social. "Plus on a de liens sociaux, plus on les maintient, plus on les construit, mieux le cerveau fonctionne".

Vie Saine et Zen