Microbiote intestinal et santé mentale

Microbiote intestinal et santé mentale

Il jouerait un rôle dans le développement de maladies psychiques (anxiété, dépression), neuro-développementales (autisme) ou neurologiques (maladie d’Alzheimer et de Parkinson)… Le microbiote intestinal fait l'objet recherches scientifiques de plus en plus poussées.

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Sommaire

- Quels mécanismes ?
- Quelles maladies concernées ?
- Que disent les psychiatres ?
- L'importance de l'alimentation ?
- De nouveaux traitements ?
- Des approches de plus en plus personnalisées ?
- Médecine intégrative ?

Le microbiote intestinal est au cœur de nombreuses études où son association avec de nombreux troubles et maladies est attestée. Dans quelle mesure est-il lié à la santé mentale ? Nous avons posé la question à Emmanuelle Lecommandeur, docteure en biochimie, responsable du pôle Recherche et Développement chez Nahibu.

Est-ce qu'on comprend aujourd'hui les mécanismes qui permettent au microbiote intestinal d'influer sur notre santé mentale ?
Emmanuelle Lecommandeur : On commence à comprendre, mais j'insiste sur "on commence". Il y a beaucoup d'études qui sont faites sur les souris et l'on sait bien que ce n'est pas forcément représentatif de ce qui se passe chez l'homme. De nombreuses études ont été démarrées sur l'être humain. Une des hypothèses est que certaines compositions du microbiote favorisent une hyperperméabilité intestinale qui permet le passage dans l'organisme d'éléments pathogènes voire de résidus alimentaires. Cela peut causer des phénomènes inflammatoires localisés ou pouvant atteindre le cerveau, avec une stimulation du système immunitaire et une production de composés qui s'appellent les cytokines et qui vont réguler les niveaux d'inflammation. C'est une des façons par lesquelles le microbiote agit sur le cerveau. Mais pour l'instant il n'y a pas de mécanisme élucidé qui expliquerait tous les troubles de la santé mentale. On est encore en train de chercher.

Quelles sont les maladies concernées ?
EL : On constate sur les souris que même les troubles légers comme l'anxiété sont régulés par le microbiote. Sur de nombreux troubles et maladies, comme les syndromes dépressifs majeurs, les troubles anxieux, l'autisme, la schizophrénie, le syndrome de fatigue chronique ou des maladies neurodégénératives comme Alzheimer ou Parkinson, on constate des perturbations du microbiote intestinal. Tout l'enjeu est de savoir si ce changement de composition du microbiote en est la cause ou la conséquence. On encore le maillon d'un cercle vicieux inflammatoire.

Que disent les psychiatres sur cette approche ?
EL : La plupart des études effectuées sur les humains sont faites en collaboration avec des psychiatres. Je pense que, pour eux, c'est un espoir de pouvoir trouver un jour de nouvelles manières de guérir ou, pour le moins, d'alléger les symptômes.

Est-ce que cette association entre microbiote et santé mentale ne met pas en lumière l'importance de l'alimentation en matière de prévention et de protection vis à vis des maladies concernées ?
EL : Je le pense fortement. L'hyperperméabilité intestinale est en grande partie causée par de mauvaises habitudes alimentaires. Le fait d'avoir une alimentation adaptée susceptible de lutter contre l'inflammation constitue clairement une voie d'amélioration.

Est-ce que cela ouvre des pistes pour de nouveaux traitements ?
EL : Des probiotiques ont été testés et montrent des bénéfices intéressants chez certaines populations. Les probiotiques sont des organismes vivants. Ils peuvent ne pas avoir les mêmes effets selon les personnes concernées. Mais les bactéries du type bifidobactéries ou lactobacilles joueraient un rôle sur l'activité neuronale en modulant la production de neurotransmetteurs susceptibles de participer au renforcement de la barrière intestinale.

Va-t-on vers des approches de plus en plus personnalisées ?
EL : Oui. Chaque personne est unique et possède un microbiote spécifique. Dans le cadre de la prévention, il est certain que les prises en charge seront beaucoup plus personnalisées concernant l'alimentation, les compléments alimentaires ou les probiotiques. Au départ, on pourra peut-être juste réguler des troubles. Mais on a l'espoir à terme de soigner des maladies ou au moins d'améliorer les symptômes.

On parle de plus en plus de médecine intégrative. La santé mentale n'est-elle pas tout particulièrement concernée par ce projet ?
EL : Oui, toutes les approches non conventionnelles se complètent. La compréhension du microbiote intestinal et l'adaptation de l'alimentation s'intègre parfaitement dans cette dynamique où l'on ne soigne pas un symptôme isolé. L'objectif est d'appréhender la personne comme un individu spécifique, dans son entièreté et son unicité.

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Un lien entre le microbiote intestinal et l'autisme ?

Les scientifiques constatent que l’autisme est souvent accompagné de troubles digestifs.
"Il est démontré qu’une proportion importante d’individus atteints d’autisme ont un microbiote différent", explique Guillaume Fond, psychiatre, enseignant, chercheur et auteur spécialiste du lien microbiote et santé mentale à l’AP-HM de Marseille.

Les enfants qui souffrent d’autisme auraient "10 fois plus de bactéries de type Clostridium, une augmentation des Bacteroidetes et Desulfovibrio, et une diminution des Firmicutes et Bifidobacterium".
Une augmentation de la perméabilité intestinale a aussi été décrite.

Le microbiote se constitue pendant les 3 premières années de vie. Les symptômes de l’autisme, quant à eux, se font remarquer entre 2 et 3 ans environ.

Les études montrent que des souris développent un comportement d'anxiété et une automutilation si la composition de leur microbiote est significativement modifiée durant une certaine période de leur croissance.
"Les chercheurs posent l'hypothèse qu'un phénomène similaire surviendrait chez les enfants et favoriserait le développement de l'autisme", selon l’INSERM.

 

Source : Doctissimo, Dépression, stress, autisme : l'influence du microbiote sur la santé mentale

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