Beaucoup avaient cru que le sujet pouvait faire consensus. Il faut dire que les thématiques environnementales, du changement climatique à la toxicité des multiples pollutions industrielles, mettent en cause à ce jour l’habitabilité de la planète par l’être humain voire la survie de l’espèce. Il était donc logique que tout le monde sur terre se sente concerné, se rende compte de l’urgence de l’affaire et entame sans plus tarder la nécessaire transition écologique. Mais c’était sans compter l’ampleur de la cupidité humaine...
Dans un premier temps, la prédation de l’homme sur la nature a été camouflée, maquillée sous les oripeaux de la défense de l’environnement. Tous les produits de consommation se sont subitement affublés de vertus supposées vertes. Plus respectueux de la planète que moi tu meurs ! Mais ça a marché moyen auprès des citoyennes et des citoyens qui ne sont pas des imbéciles. Et puis les dégâts (catastrophes naturelles, migrations de population, pertes de biodiversité, dégradation de la santé publique…) se sont considérablement aggravés, de plus en plus proches et concrets.
On a donc changé de registre. Il est devenu de bon ton de se moquer des sujets écologiques, parfois par simple sentiment d’impuissance, parfois dans un déni cynique et arrogant, parfois en propageant de fausses informations, parfois par renversement sémantique en rendant responsables de tous les maux de la terre les pauvres militants écolos qui font ce qu’ils peuvent et pas toujours avec habileté.
“L’environnement, ça commence à bien faire”, avait prédit un ancien président de la République Française aujourd’hui sous bracelet électronique. Pour la nouvelle administration états-unienne, c’est encore plus simple : toutes ces questions n’existent pas, il s’agit d’une vaste blague. En Europe, une petite musique du même tonneau commence à gagner du terrrain, notamment dans le monde agricole, ce qui est un comble… On est donc passé du greenwashing au greenbashing. Bientôt au greenghosting. Les masques sont tombés.
Celles et ceux qui pensaient que l’ensemble de l’humanité allait dans un même élan unanime prendre le train de la transition écologique en sont pour leur frais. Les experts en psychologie positive y trouveront sans doute matière à dégager une belle opportunité. Hier on était dans l’illusion, aujourd’hui on y gagne en lucidité : les enjeux financiers sont tellement puissants et exercent une telle influence sur la gouvernance des pays qu’il était bien naïf de croire qu’ils auraient pu faire le deuil de sources de profit aussi juteuses que les énergies fossiles, les métaux stratégiques ou les phytosanitaires.
Hier les féministes qui défendaient l’universalité de la cause de l’égalité homme-femme se sont heurtées au mur de l’obscurantisme religieux.
De la même manière, face au mur de l’argent, les écologistes aujourd’hui doivent ouvrir les yeux sur la réalité du rapport de forces qui existe dans le monde, passer outre leurs divisions, changer leurs méthodes d’action et de communication…
La transition écologique est un combat. Elle ne se fera malheureusement pas dans un monde de bisounours.