La face cachée du poisson : quand la mer paye l’addition

La face cachée du poisson : quand la mer paye l’addition

Derrière chaque filet de saumon ou boîte de thon, il y a de grands enjeux écologiques, économiques et humains.

La Fondation de la Mer alerte sur le fait que la pression sur les ressources halieutiques atteint des niveaux critiques. En clair : si nous ne changeons pas nos habitudes, c’est la mer qui continuera de payer la note. Et nous avec.

Un milliard de personnes dépendent du poisson comme principale source de protéines, et 3,2 milliards comptent sur lui pour au moins 20 % de leur apport en protéines animales.
Chaque année, dans le monde, environ 80 millions de tonnes de poissons sont pêchées. 35,5 % des stocks halieutiques mondiaux sont déjà surexploités. Le chiffre grimpe à 93 % en Méditerranée, ce qui représente un quasi-effondrement pour certaines espèces emblématiques comme le thon ou le cabillaud.

La France fait partie des champions en terme de consommation de poisson : en moyenne 32 kg de produits de la mer par an et par habitant. C’est largement au-dessus de la moyenne mondiale qui est de 20 kg.
C’est bon pour la santé, certes, mais 70 % du poisson consommé en France est importé, alors que notre pays possède la deuxième plus grande surface maritime au monde.
Il faudrait donc modifier nos habitudes et sortir du "triangle infernal" : saumon, thon, cabillaud (le thon génère 24 % du chiffre d’affaires global des produits de la mer, malgré des stocks sous tension). Dorade, tacaud, rouget grondin, raie… les espèces moins connues sont souvent plus abondantes et locales.

Problème : l’étiquette ne nous aide pas toujours à faire les bons choix. Selon La Fondation de la Mer, “38 % des produits de la mer transformés vendus en France ne permettent pas d’identifier avec certitude l’espèce, l’origine ou la méthode de pêche”. Lorsque c’est possible, on peut privilégier le label MSC, malgré ses faiblesses (il certifie encore des pêcheries utilisant le chalutage).

La Fondation de la Mer recommande de réduire notre consommation, de faire attention à la saisonnalité et de privilégier certaines zones de pêche où la gestion des stocks est globalement plus stricte : zones FAO 27 (Atlantique Nord) et FAO 37 (Méditerranée).
En été : mulet, sardines, maquereau, moules de bouchot, bar… En hiver : merlan, dorade, Saint-Pierre, turbot, coquilles Saint-Jacques, moules, hareng…
La technique de pêche compte également : ligne, casier ou filet ont généralement un impact bien moindre que le chalutage de fond, l’une des méthodes les plus destructrices pour les écosystèmes marins.
Et l'on peut privilégier les circuits courts (comme Poiscaille, par exemple).

Certaines zones lointaines, moins contrôlées, présentent en effet un risque élevé de surexploitation ou de pêche INN (illégale, non déclarée ou non réglementée : entre 20 et 30 % des captures mondiales). Avec à la clé un système de type maffieux : effondrement de stocks déjà épuisés, concurrence déloyale pour les pêcheurs artisanaux, blanchiment des captures via des chaînes d’approvisionnement opaques et 128 000 pêcheurs victimes de travail forcé.

La Fondation de la Mer appelle à accélérer sur trois fronts : appliquer les lois existantes, renforcer la traçabilité et développer les technologies de suivi en mer pour réduire les angles morts. 
Protéger l’océan n’est pas un luxe : c’est une question de survie. Réduire notre consommation, mieux choisir, exiger plus de transparence : à l’échelle du consommateur, ces gestes peuvent sembler minimes. Mais collectivement, ils ont le pouvoir de changer la donne et d’éviter que la mer ne continue, seule, à payer l’addition.

 

Source : We Demain, Florence Santrot - 26/11/25

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