Une agriculture 100 % bio en France est-elle possible ?

Une agriculture 100 % bio en France est-elle possible ?

Meilleur pour notre santé et celle de l’environnement, le bio pourrait être généralisé si l’on réduisait notre consommation de viande.

Cette réduction permettrait de libérer des terres arables afin de compenser des rendements moindres. On pourrait y produire ce qui est bon pour notre santé et majoritairement importé : fruits, légumes et légumineuses. À l’arrivée, notre santé et notre environnement s’en porteraient mieux.

Aujourd’hui notre système alimentaire comporte des dépenses bien souvent invisibles pour le consommateur. Ce sont des coûts cachés. 
- L’utilisation excessive d’engrais azotés et de pesticides de synthèse rend la France très dépendante des importations et la plupart des pesticides sont nocifs pour la santé humaine et celle de l’environnement.
- La surconsommation de produits ultra-transformés et de produits animaux (en particulier viande rouge et charcuterie) contribuent au développement de maladies chroniques.
- Le développement d’élevages très intensifs en intrants, souvent concentrés géographiquement, nécessitent beaucoup d’achats d’aliments avec comme conséquences des nuisances graves sur les écosystèmes (exemple : le problème des algues vertes en Bretagne).
Au total, toutes ces dépenses équivalent aujourd’hui au montant des denrées alimentaires consommées en France : 170 milliards €.

L’agriculture et l’alimentation bio permettraient de réduire ces dépenses, car elles n’utilisent pas d’intrants de synthèse, sont plus exigeantes pour les modes d’élevage et plus restrictives quant aux additifs autorisés dans la fabrication des aliments. 

À la clé, l’alimentation bio est, avant tout, meilleure pour la santé. Ainsi, les produits biologiques ont en moyenne des teneurs un peu supérieures en micronutriments, notamment en antioxydants, mais surtout contiennent moins de résidus de pesticides. D’où une réduction du risque de maladies chroniques, selon des études épidémiologiques et quelques études cliniques (notamment concernant le cancer du sein chez la femme ménopausée).

L’agriculture biologique a aussi des atouts pour le sol et la biodiversité. Les élevages ont une moindre densité d’animaux au mètre carré et ont accès à des parcours, ce qui est meilleur pour le bien-être animal et réduit le risque de pollution.
Point faible : avec des rendements de culture moins élevés, les émissions de gaz à effet de serre peuvent être légèrement plus forts qu’en agriculture conventionnelle. Il faut aussi savoir que le cuivre et le soufre utilisés par certains vignerons ou maraîchers bio pour lutter contre les maladies, ne sont pas sans impact sur les sols.

En France, l’agriculture conventionnelle représente aujourd’hui 90 % des terres agricoles et est à l’origine de 94 % des dépenses alimentaires des ménages. Une agriculture totalement bio constitue donc un horizon encore lointain. Mais il serait possible de consommer plus de produits bio, globalement bénéfiques pour la santé et pour l’environnement. Il faudrait pour cela diminuer notre consommation de produits animaux et donc la surface agricole réservée à l’élevage pour en consacrer plus aux productions végétales. 

Notre consommation moyenne de protéines totales (1,4 g/jour de protéines par kg de poids corporel) excède aujourd’hui les recommandations d’environ 30 % et les besoins de 70 % (0,83 g/jour de protéines par kg de poids corporel). 
Les produits laitiers sont également surconsommés aujourd’hui : en moyenne 70 g de fromage par jour alors qu’il est conseillé de ne pas dépasser 40 g.
Un régime plus végétalisé serait meilleur pour la santé.
On pourrait donc, sans risque, baisser la consommation de produits carnés, de l’ordre de 50 % en moyenne, pour respecter les limites planétaires, notamment pour le climat et pour l’azote, sans augmenter la dépendance aux importations.

Les élevages à développer seraient ceux où l’alimentation des animaux provient principalement des prairies pâturées ou récoltées. Ceux qu’ils faudraient réduire seraient les plus intensifs en intrants de synthèse, et/ou concentrés géographiquement, qui utilisent le plus de terres labourables et sont le plus dépendants d’importations de concentrés (soja) pour l’alimentation des animaux.
Il faudrait parallèlement développer de manière massive la culture des légumineuses qui ont l’immense intérêt de ne pas exiger d’apport en engrais azotés, de réduire de moitié le gaspillage alimentaire et de recycler une partie de nos urines naturellement riches en azote. 

 

Source : The Conversation, Michel Duru - 01/10/25

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